CES CORPS QUI NOUS ENTOURENT

Les étoiles primordiales : à la recherche de nos ancêtres célestes

Début 2023, l’Observatoire de Paris publiait un communiqué de presse pour annoncer la détection d’un nuage de gaz contenant des traces des premières étoiles : les étoiles primordiales. Entretien avec Sylvain Bontemps, chercheur CNRS en astrophysique, sur ces premières lueurs.
Représentation d'atomes dans un nuage de gaz
© ESOL - M. Kornmesser

Parfois regroupées en amas, qu’ils soient ouverts ou globulaires, elles peuvent aussi évoluer seules ou encore par paires et leur nombre forme des galaxies. Elles sont partout dans l’univers et l’une d’elles nous chauffe et nous éclaire, elles se nomment : étoiles. Nous aimons les contempler, mais il est rare que nous nous demandions à quoi pouvaient ressembler les premières d’entre elles, les étoiles primordiales.

Les premiers sursauts de l’univers naissant

« Le bigbang a, dans son refroidissement rapide, fixé la composition initiale de l’univers avec presque uniquement de l’hydrogène et un peu d’hélium. D’un seul coup, les premières étoiles ont permis de former de nouveaux éléments », explique Sylvain Bontemps, scientifique au Laboratoire d’Astrophysique de Bordeaux (LAB). Constitué d’hydrogène et d’hélium, notre univers en expansion tendait en effet à se refroidir progressivement dans un calme immuable. Ce n’est pourtant pas ce que nous observons aujourd’hui.

 

Sous l’influence de la matière noire et de sa gravité, les composantes de notre jeune univers se sont réunies pour former des nuages de gaz. Sous l’effet des pressions grandissantes d’une quantité de matière de plus en plus élevée, ces nuages de gaz se sont contractés et la température en leurs cœurs s’est élevée rapidement. Les premières réactions de fusion nucléaire se sont alors enclenchées pour former de l’hélium à partir d’hydrogène. Les étoiles primordiales sont officiellement nées. Productrices de carbone, d’oxygène ou encore de fer, ces pionnières d’une longue histoire stellaire ont permis la création de nouveaux éléments chimiques.

Les moyens de détection

Bien que beaucoup d’entre elles soient éteintes depuis longtemps, les premières étoiles de l’univers se différencient des générations suivantes, notamment dans les traces qu’elles laissent après leur mort. Lorsqu’une étoile arrive en fin de vie, elle laisse derrière elle un nuage de gaz remarquable par sa composition chimique. Pour les étoiles actuelles, nous observons dans le gaz résultant, une certaine quantité de carbone que nous comparons à la quantité de fer présent. En revanche, une surabondance de carbone, ou plutôt, un déficit de fer dans ces nuages, correspond davantage aux signatures d’étoiles primordiales.

 

 

Schéma montrant la dispersion de la lumière par un nuage de gaz entre une étoile et un télescope.
© ESO - L. Calçada

Les étoiles primordiales ont pourtant tout autant formé de fer que leurs descendantes, « du fait qu’elles étaient très massives, il n’y a pas de raison de penser qu’elles se soient arrêtées à ne former que du carbone », souligne l’astrophysicien. Cet excès de carbone traduit plutôt le fait que lors de la mort de l’étoile, seuls les éléments chimiques en périphérie de cette dernière, les plus légers, ont été expulsés dans le milieu interstellaire, formant ces fameuses traces que nous pouvons détecter aujourd’hui. Les atomes plus lourds, dont le fer fait partie, ont quant à eux été emprisonnés dans le “reste” de l’étoile, vraisemblablement dans un trou noir.

Une étape essentielle dans la construction chimique de notre univers

Nino Quillent-Elinguel

Le gaz résultant de la mort des étoiles primordiales a permis de former de véritables pouponnières d’étoiles. Des amas de gaz et de poussières dans lesquels sont nées les générations suivantes d’étoiles, y compris, celles que nous connaissons aujourd’hui. Les étoiles primordiales ont donc débuté un processus amenant à la grande diversité chimique de l’univers actuel. « Ces premières étoiles ont permis la diversité d’éléments chimiques suffisante pour permettre l’apparition de la vie sur notre planète », confirme le scientifique.

 

En effet, les formes de vie que nous connaissons aujourd’hui sont principalement basées sur le carbone. Élément ayant bel et bien été conçu au sein des étoiles, véritables usines dans lesquelles est fabriquée la grande majorité des atomes présents dans notre corps. Hubert Reeves disait donc vrai : « Nous sommes tous des poussières d’étoiles. »