Emmanuelle Saillard

©Suzane Fleury, Centre Inria de l’université de Bordeaux

Emmanuelle Saillard

Le calcul haute performance

Dans ce portrait, plongez dans l’univers d’Emmanuelle Saillard, chargée de recherche dont le domaine d’expertise est le calcul haute performance. Au cœur d’Inria, elle repousse les limites de la performance informatique, dans un milieu où la quête du savoir et de l’innovation s’entrelacent pour permettre l’avancement de la recherche.

Emmanuelle Saillard est chargée de recherche à Inria depuis six ans maintenant. Elle travaille au sein de l’équipe STORM (Static Optimizations and Runtime Methods). Son domaine d’expertise est le calcul haute performance. Elle travaille plus particulièrement à « développer des analyses pour optimiser au mieux et détecter les erreurs le plus vite possible », nous explique-t-elle. En tant que chargée de recherche, son quotidien est rythmé par des activités très diverses comme le développement de nouvelles techniques, les échanges avec les équipes, la retranscription d’idées par le codage, ou encore la rédaction d’articles scientifiques. Elle a également décidé d’intégrer l’enseignement à ses journées, à hauteur de douze heures, au premier semestre, en école d’ingénieur·e·s.

 

Pour en arriver là, Emmanuelle Saillard est passée par différentes formations, toujours guidée par son appétence pour les mathématiques et l’informatique. « Après le lycée, je voulais être professeure de maths. », nous apprend-elle. Donc, après deux ans de classes préparatoires aux grandes écoles, elle part en 3e année de licence mathématiques et informatique. Puis, s’en suit un master en informatique général et un master 2 de recherche appelé COSY (des concepts aux systèmes), à Versailles. Elle a ensuite réalisé une thèse et ce n’est finalement pas vers l’enseignement qu’elle s’est dirigée, mais plutôt vers une carrière de chargée de recherche. Son domaine lui permet de se sentir libre dans ce qu’elle fait, et elle ajoute : « Il y a une flexibilité dans mon métier que j’apprécie énormément. »

Le monde dynamique du calcul haute performance

Le calcul haute performance, ou HPC, permet de traiter une grande quantité de données et d’effectuer des calculs complexes à des vitesses élevées. « On s’en sert quand on a besoin de comprendre un phénomène complexe », nous explique-t-elle, tout en ajoutant « par exemple avec la météo il y a beaucoup de données à traiter en même temps, c’est très long, donc il faut diviser les calculs en différentes parties indépendantes qui peuvent se faire en parallèle sur différentes machines (processeurs). Cet ensemble forme les supercalculateurs. » Les données récoltées permettent alors de réaliser des découvertes scientifiques majeures. L’exemple le plus concret est sûrement son application sur le corps humain. Une équipe, accompagnée de médecins, a réussi à reproduire l’activité cardiaque sous la forme d’un programme. « Si on parvient à le faire tourner plus vite, cela veut dire aider plus vite les patients mais surtout plus précisément. On va pouvoir faire plus de calculs et au lieu de se mettre à l’échelle d’un amas de cellules par exemple, on pourra être à l’échelle d’une cellule. C’est une application qui peut aider à sauver des vies ».

 

À la question, « Pourquoi le calcul haute performance ? », sa réponse est simple : « C’est un domaine que je trouve intéressant parce que j’ai l’impression qu’on aide un peu tout le monde dans tellement de domaines différents. » En effet, les applications de ce dernier sont multiples : optimisation de la production d’énergie, modélisation climatique, études géophysiques, analyses financières, montage de longs-métrages, réalisation d’effets spéciaux…

Hommes devant des ordinateurs à calcul haute performance

© Inria / Photo C. Morel

Après le lycée, je voulais être professeure de maths.

Les mots d’ordre : optimisation et vérification

Parfois, des erreurs se glissent dans ces calculs, produisant des résultats faussés ou des blocages. C’est à ce moment qu’Emmanuelle intervient. Son but est de développer des techniques afin d’optimiser au mieux les calculs et de détecter les erreurs plus rapidement. Dans ce milieu, l’optimisation et la vérification occupent une place centrale. « On veut de la performance, parce que le but est toujours d’aller plus vite. Pour moi, le plus important, c’est d’avoir des calculs justes, d’où l’importance de la vérification », nous dit Emmanuelle. À la question, « Quels sont les défis à relever selon vous dans ce domaine ? », elle nous répond : « Ce qui représente un défi, mais qui est aussi stimulant dans ce milieu, c’est le fait de découvrir de nouvelles technologies. » En effet, le calcul haute performance demande d’être en constante évolution. L’apprentissage ne s’arrête jamais, c’est certainement ce qui en fait sa force, « je pense que je m’ennuierais sans ça ».

Deux personnes devant la Maison de la Simulation

© Inria / Maison de la Simulation / Photo H. Raguet

Les chercheur·euse·s travaillent seul·e·s ?

De nombreux préjugés circulent autour du monde de la recherche. Un des plus courants est que les chercheur·euse·s travaillent seuls dans leur laboratoire, coupés du monde. Emmanuelle nous affirme que ce n’est pas du tout le cas : « Je travaille toujours en équipe, on échange énormément avec les collègues, avec des personnes du domaine, je travaille aussi avec les étudiants. C’est très rare de travailler seul. »

De plus, le monde du codage et de l’informatique semble, de l’extérieur, être majoritairement masculin. C’est ce que nous confirme Emmanuelle : « C’est complètement vrai. Par exemple, dans mon master, on était deux filles. Dans la promotion où je donne des cours, sur 18 étudiants il y a deux filles, c’est un problème. » De nombreuses raisons sont à l’origine de ce phénomène. Des initiatives apparaissent toutefois pour tenter de palier à cela nous apprend Madame Saillard, comme l’initiative : « Moi informaticienne – Moi mathématicienne », à laquelle elle prend part. Créée à l’université de Bordeaux et maintenant associée à Inria, elle permet à des filles de troisième et seconde de venir découvrir ces domaines pendant une semaine à l’université. À cela s’ajoute également le programme « Tech pour toutes », ayant pour but d’accompagner les jeunes filles voulant réaliser des études supérieures dans le numérique.

Quel conseil donneriez-vous à une personne qui souhaite poursuivre une carrière dans la recherche ?

« Il faut rester curieux. Le networking est aussi très important, il faut aller voir les gens, discuter, échanger. Il faut être sociable en fin de compte. »

Jeanne Ducourneau